Proposition de loi relative à la déclaration domiciliaire
Texte n° 745 rectifié (2021-2022) de Mme Elsa SCHALCK, M. Claude KERN et plusieurs de leurs collègues, déposé au Sénat le 29 juin 2022.
Exposé des motifs
Mesdames, Messieurs,
Cette proposition de loi vise à instaurer une obligation de déclarer son nouveau domicile en mairie avec la possibilité pour les communes d’établir un registre domiciliaire, afin que chaque commune puisse disposer d’une information précise et actualisée de sa population communale.
La connaissance exacte de la population habitant sur un territoire donné est indispensable aux maires et aux élus locaux. L’efficacité de la gestion d’une commune ne peut passer que par la connaissance de la population qui la compose, afin de mieux planifier la mise en place de services publics.
Actuellement, en France, les personnes récemment installées dans une commune ne sont pas assujetties à l’obligation de déclarer en mairie leur nouveau domicile, à l’exception des ressortissants étrangers, en vertu du décret n°47-2410 du 31 décembre 1947. Il s’agit en effet d’une simple faculté prévue par l’article 104 du Code civil, très peu appliquée dans les faits.
Près de 11 % de la population française déménage chaque année. Cette absence de déclaration engendre donc de nombreuses difficultés pour les élus locaux dans la gestion de leurs communes. Le recensement réalisé actuellement tous les cinq ans pour les communes de moins de 10 000 habitants ne permet de pallier cette absence, ni de connaître la population de la commune en temps réel.
De nombreux pays européens voisins, dont l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, l’Espagne, la Suisse ou l’Italie ont mis en place une procédure obligatoire de déclaration de domiciliation auprès des services municipaux, assortie de sanctions. Cette obligation de déclaration n’y est pas jugée comme attentatoire à la vie privée ou à la liberté d’aller et venir.
Un tel régime de déclaration de changement de domicile existe en droit local applicable en Alsace-Moselle. Or du fait de l’abrogation des sanctions pénales propres au droit local en 1919, cette obligation de déclaration est progressivement tombée en désuétude. De nombreux maires et élus d’Alsace-Moselle reconnaissent l’utilité de cette déclaration domiciliaire et appellent de leurs voeux cette obligation d’inscription en mairie.
Les communes, qui font face à un accroissement de leurs compétences et obligations, doivent répondre aux besoins de leurs concitoyens notamment concernant les infrastructures scolaires et périscolaires. Elles ont dès lors besoin de disposer d’un outil qui leur permette de connaître et d’anticiper les besoins de la population. Il s’agit également de redonner aux élus locaux les moyens d’administrer leurs communes. Il s’agirait d’une mesure de bon sens.
Cela permettrait également de faire face à des situations d’urgence, comme nous l’a démontré la crise de la Covid 19 pendant laquelle les élus locaux se sont retrouvés en première ligne pour la fourniture de masques à la population.
Par ailleurs, les maires doivent de plus en plus mettre en place des mesures préventives contre les risques sanitaires ou naturels (plans canicule à destination des personnes âgées ou vulnérables). La tenue d’un registre domiciliaire faciliterait ainsi leur mise en oeuvre et leur communication afin d’agir au mieux au service des habitants.
Nous savons que le nombre d’habitants est un facteur déterminant en matière de finances locales. Dans un contexte budgétaire très contraint pour les collectivités territoriales, cette donnée a donc toute son importance.
Faisant écho au dispositif « Dites-le nous une fois », lors de l’examen du projet de loi portant différenciation, décentralisation, déconcentration et simplification de l’action publique locale (Loi « 3DS »), le Sénat avait adopté un amendement permettant d’étendre le partage d’informations à destination des communes et des élus locaux.
Il y a là aussi un intérêt pour les citoyens à s’inscrire en mairie pour bénéficier dès leur installation des services fournis par la collectivité.
Ainsi, cette proposition de loi met en oeuvre un dispositif à la fois souple et pragmatique de déclaration en mairie, qui comprendrait les noms, prénoms, dates et lieux de naissance de l’ensemble des personnes composant le foyer. Cette déclaration pourra être faite par tous moyens et devra intervenir dans un délai de deux mois suivant le déménagement.
Cette proposition de loi permet également aux communes qui le souhaitent de consigner ces informations dans un registre qui leur serait propre, conformément à la règlementation en vigueur en matière de protection des données à caractère personnel, qui impose notamment que les données soient collectées pour des « finalités déterminées, explicites et légitimes » et de les utiliser de manière proportionnée.
Il appartiendra au pouvoir règlementaire de fixer la sanction applicable en cas de défaut de déclaration dans le délai imparti.
Tel est l’objet de la présente proposition de loi.