Proposition de loi organique visant à garantir la qualité du débat démocratique et à améliorer les conditions sanitaires d’organisation de l’élection présidentielle dans le contexte lié à l’épidémie de covid-19
Texte n° 346 (2021-2022) de M. Philippe BONNECARRÈRE et plusieurs de ses collègues, déposé au Sénat le 12 janvier 2022.
Exposé des motifs
Mesdames, Messieurs,
L’élection présidentielle est la clé de voute de nos institutions. Notre pays ne saurait être privé d’une véritable campagne du fait de la crise sanitaire liée à l’épidémie de covid-19.
Conformément aux dispositions de la loi organique n° 2016-506 du 25 avril 2016 de modernisation des règles applicables à l’élection présidentielle, nous sommes entrés, depuis le 1er janvier 2022, dans la première période de la campagne pour l’élection du Président de la République (dite « période préliminaire ») durant laquelle les éditeurs (audiovisuels) veillent à ce que les candidats déclarés (ou présumés) et leurs soutiens bénéficient d’une présentation et d’un accès équitables à l’antenne. Durant la seconde période de la campagne (dite « période intermédiaire »), qui débutera le 8 mars prochain, les éditeurs veillent à ce que les candidats et leurs soutiens bénéficient d’une présentation et d’un accès équitables à l’antenne dans des conditions de programmation comparables.
Si le régime applicable à la campagne audiovisuelle pour l’élection présidentielle est bien encadré, les auteurs de la présente proposition de loi organique s’interrogent sur sa bonne adéquation avec les restrictions juridiques et psychologiques résultant de l’épidémie de covid-19. En effet, c’est l’ensemble de la campagne électorale qui est altéré par les conséquences directes ou indirectes de la crise sanitaire, avec notamment la difficulté, voire l’impossibilité, d’organiser des réunions publiques à plus ou moins grande échelle.
Afin d’assurer néanmoins les meilleures conditions au débat démocratique, il apparait indispensable de renforcer les obligations applicables aux principaux médias audiovisuels dans le cadre de cette campagne si particulière en imposant un temps minium d’antenne consacré chaque semaine au débat préalable à l’élection présidentielle. La modification proposée ne change rien quant au contrôle exercé par l’ARCOM (nouveau régulateur de la communication audiovisuelle et numérique ayant remplacé le CSA et la HADOPI depuis le 1er janvier 2022).
L’article 1er prévoit ainsi que les principaux médias audiovisuels devront consacrer au moins quatre heures de diffusion chaque semaine aux candidats (déclarés ou présumés) à l’élection présidentielle ou à leurs représentants.
Les modalités de mise en oeuvre de cette période minimale de diffusion resteront à la libre appréciation des médias concernés. Il sera de la responsabilité éditoriale de chacun de définir les plus pertinentes. Cette obligation cessera au début la campagne officielle qui est soumise à des règles spécifiques (notamment l’égalité stricte de temps de parole).
Le dispositif proposé ne modifie donc pas le régime applicable pendant la campagne officielle (du 28 mars au 9 avril 2022), troisième période du régime instauré par la loi organique précitée du 25 avril 2016.
Il ne s’agit donc pas de modifier le régime applicable à la campagne audiovisuelle mais de le compléter, à titre exceptionnel, étant données les contraintes qui découlent de la crise sanitaire.
Ce régime serait applicable aux éditeurs (chaînes de télévision généralistes, chaînes de télévision d’information et stations de radio d’information) visés par la recommandation n°2021-03 du 6 octobre 2021 du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), à savoir notamment : TF1, France Télévisions,Canal + pour son programme en clair, M6, C8, BFM TV, CNews, LCI, Franceinfo, Radio France (France Inter, France Info, France Culture, France Bleu), RTL, Europe 1, RMC, BFM Business.
Si la campagne électorale est profondément affectée par la crise sanitaire, il faut également se pencher sur le déroulement des opérations de vote qui, elles aussi, seront touchées par le contexte sanitaire. Il est possible d’espérer qu’en avril prochain l’épidémie aura perdu en intensité mais il n’est pas raisonnable de fonder l’organisation du scrutin le plus important pour nos institutions sur une hypothétique amélioration de la situation sanitaire. Aussi nous devons, comme nous l’avions fait pour les dernières élections régionales et départementales, adopter tous les aménagements de nature à rassurer les électeurs et à assurer une meilleure sécurité sanitaire dans les bureaux de vote.
Ainsi, l’article 2 propose de faciliter le vote par procuration, en permettant à chaque électeur de disposer de deux procurations (contre une seule aujourd’hui). Il consacre également un droit pour l’électeur d’établir sa procuration depuis son domicile. Il permet enfin au mandant de confier sa procuration à tout électeur, y compris lorsque celui-ci est inscrit sur la liste électorale d’une autre commune.
Reprenant les dispositions adoptées par le Sénat dans la perspective des élections locales, l’article 3 propose d’ouvrir la possibilité d’augmenter le nombre de bureaux de vote pour éviter une trop forte concentration des électeurs (alors, qu’aujourd’hui, un bureau peut compter entre 800 et 1 000 électeurs inscrits). Il appartiendrait au préfet de vérifier concrètement avec les communes concernées si elles sont, ou non, en mesure de dédoubler les bureaux les plus fréquentés (disponibilité des présidents, assesseurs, …). L’idée étant d’ouvrir cette possibilité de dédoublement aux communes qui le souhaitent et non d’en faire une obligation. Il semble en effet préférable d’alléger le nombre d’électeurs par bureaux de vote plutôt que d’allonger la durée d’ouverture de ces bureaux.