Proposition de loi visant à renforcer le pouvoir des maires et des présidents d’établissement public de coopération intercommunale dans la lutte contre les infractions au code de l’urbanisme
Texte n° 599 (2021-2022) de Mme Else JOSEPH et plusieurs de ses collègues, déposé au Sénat le 30 mars 2022.
Exposé des motifs
Mesdames, Messieurs,
Le respect des dispositions du Code de l’urbanisme est un véritable enjeu pour les maires de nos communes et aussi, par extension, pour les présidents d’établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), compétents dans ces questions.
Si en leur qualité d’officier de police judiciaire reconnue par la loi, ces autorités dressent le procès-verbal de l’infraction, cette démarche débouche rarement sur la cessation de la situation illicite, alors que la violation des dispositions est flagrante et que le préjudice causé à l’urbanisme de la commune peut être important. Les situations d’illégalité affaiblissent ainsi la politique de nos maires.
En effet, selon le principe classique du droit pénal de l’appréciation de l’opportunité des poursuites reconnu au ministère public, cela peut conduire à l’engagement d’une procédure répressive, mais aussi au classement sans suite.
Or, dans la pratique courante, ce n’est que dans un faible nombre de situations que la transmission au ministère public aboutit à la saisine effective du juge, puis à la condamnation de l’auteur de l’infraction au Code de l’urbanisme. Le seul établissement d’un procès-verbal rend incertaine la cessation de la violation d’une disposition du droit de l’urbanisme car il ne permet pas de mettre fin, sur le champ, au comportement fautif.
Cette situation est d’autant plus frustrante qu’elle met fâcheusement sur un pied d’égalité les personnes qui respectent le Code de l’urbanisme et celles qui le violent. Elle décourage le respect de la loi et constitue un message désastreux pour tous ceux qui respectent les démarches et procédures obligatoires dans le domaine de la construction et de l’immobilier. Ne pas réagir aboutit en fait à donner une prime à l’illégalité dès lors qu’aucune suite n’est donnée au procès-verbal, ce qui est hélas fréquent.
On peut toujours affirmer que les communes disposent de la faculté de se constituer partie civile (Code de l’urbanisme, art. L 480-1, al. 6), ce qui rend automatique l’engagement des poursuites, mais cette démarche est longue et, dans l’immédiat, ne met en aucun cas fin à la situation illicite. Quant à l’arrêté interruptif de travaux que le maire peut adopter après qu’un procès-verbal d’infraction a été dressé, il relève d’une démarche qui ne met pas fin rapidement à la situation litigieuse.
Pour mettre rapidement fin à ces situations, la présente proposition de loi suggère d’étendre le mécanisme de l’amende forfaitaire délictuelle : le procès-verbal est ainsi assorti d’une amende que l’intéressé doit payer immédiatement. Cette possibilité existe déjà dans le Code de la route, comme dans le délit de conduite sans être titulaire du permis ou du délit de conduite sans assurance. En effet, une amende forfaitaire peut être prononcée pour toute infraction punie d’une amende allant jusqu’à 3 000 euros, conformément au code de procédure pénale.
Pour améliorer l’efficacité du procès-verbal dressé par le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale, il est proposé d’instituer la possibilité de prononcer une amende forfaitaire délictuelle pour tout procès-verbal qui infligerait une amende dont le montant pourrait aller jusqu’à 3 000 euros dans les infractions mentionnées au troisième alinéa de l’article L 480-1 du code de l’urbanisme, c’est-à-dire celles prévues par les articles L 480-4 et L 610-1 dudit code. Il s’agit notamment des travaux effectués en méconnaissance des articles L 421-1 à L 421-5 du code de l’urbanisme : cela vise ainsi les constructions sans permis de construire, les travaux, installations et aménagements sans permis d’aménager, ainsi que les démolitions de constructions existantes sans permis de démolir. En effet, les infractions au code de l’urbanisme consistent surtout en des délits. Un certain nombre de ces délits peuvent être punis d’une amende allant jusqu’à 3000 euros.
Il est donc proposé de prévoir l’application de ces dispositions du Code de procédure pénale qui rendent possible l’amende forfaitaire. Conformément à ces dispositions qui renvoient à l’article 131-13 du code pénal, l’amende forfaitaire délictuelle ne peut en effet excéder un montant de 3 000 euros.
Il sera donc possible d’infliger une amende forfaitaire pour tout délit pouvant donner lieu à une amende de 3000 euros.
Pour cela, l’alinéa 4 de l’article L 480-1 du code de l’urbanisme est complété par une phrase qui renvoie aux dispositions des articles 495-17 à 495-25 du code de procédure pénale en indiquant que l’action publique est éteinte par le paiement d’une amende forfaitaire. En effet, le paiement de l’amende forfaitaire met fin à l’action publique et donc à la procédure pénale par un procédé non seulement répressif, mais dissuasif.