Les fiches des élus
Parité
Aujourd’hui, les femmes sont plus présentes dans la vie publique. Et c’est tant mieux. Il est nécessaire toutefois de faire un point sur la parité hommes/femmes dans les conseils municipaux.
Introduction
Mission "flash"
Table ronde Sénat
AMF
Parité dans les conseils municipaux
Depuis les lois constitutionnelles du 8 juillet 1999 et du 23 juillet 2008, l’article 1er de notre Constitution dispose que « la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales ».
À la faveur de ces révisions constitutionnelles, plusieurs lois successives ont eu pour objet d’instaurer la parité dans les fonctions électives et exécutives du bloc communal :
- la loi du 6 juin 2000 impose, pour les élections communales dans les communes de plus de 3 500 habitants, une alternance par tranche de six candidats ;
- la loi du 31 janvier 2007 introduit le principe d’alternance entre les femmes et les hommes dans ces mêmes communes et crée une obligation pour les exécutifs de celles-ci d’être paritaires, sans principe d’alternance ;
- la loi du 17 mai 2013 étend le champ des communes concernées par les dispositions précédentes, en abaissant le seuil de 3 500 habitants à 1 000, et prévoit que la liste des candidats au conseil intercommunal dans les communes de 1 000 habitants et plus est composée alternativement d’un candidat de chaque sexe ;
- la loi du 27 décembre 2019 dispose que dans les communes de plus de 1 000 habitants, les adjoints sont élus au scrutin de liste et que les liste sont composées alternativement d’un candidat de chaque sexe.
Ces lois ont permis des avancées significatives. Alors que les femmes représentaient environ 30 % des conseillers municipaux en 2000, leur part s’établit aujourd’hui à 42,4 %. Dans les communes de 1 000 habitants ou plus, la parité est quasiment atteinte puisque la part des femmes est de 48,5 %.
Aucune disposition paritaire ne s’applique aux communes de moins de 1 000 habitants.
Dans les communes de plus de 1000 habitants, les conseillers municipaux sont élus au scrutin de liste, et la parité avec alternance hommes-femmes est obligatoire ; ce qui permet d’arriver à une parité presque totale.
En revanche, dans les communes de moins de 1000 habitants, l’absence de scrutin de liste paritaire et la persistance du scrutin majoritaire plurinominal avec possibilité de panachage conduit à une sous-représentation importante des femmes.
La loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019, relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique impose que le Parlement légifère avant le 31 décembre 2021 pour « étendre l’égal accès des femmes et des hommes aux fonctions électives dans les communes et leurs groupements » et qu’une « évaluation est préalablement conduite par le Parlement pour déterminer les modes de scrutin permettant cet égal accès ».
Une mission « flash » de l’Assemblée nationale sur la parité dans les fonctions électives et exécutives du bloc communal, du 6 octobre 2021, fait le constat d’une trop faible représentation des femmes dans les conseils municipaux des communes de moins de 1000 habitants, où le scrutin de liste n’est pas obligatoire.
Propositions
Choix d’une extension du scrutin de liste aux communes de moins de 1000 habitants
- Les listes seraient composées alternativement d’un candidat de chaque sexe. Par « ruissellement », une telle évolution renforcerait la parité dans les conseils communautaires ;
- la simple extension du scrutin de liste est néanmoins susceptible de se heurter au principe constitutionnel de pluralisme. Dans les communes de petite taille, la constitution de listes complètes et paritaires est mécaniquement plus difficile en raison du faible nombre d’habitants, et donc de candidats potentiels. Un nouvel abaissement du seuil requiert par conséquent des mesures parallèles de nature à préserver le pluralisme. Dès lors, pour les communes entre 500 et 999 habitants, le nombre de membres du conseil municipal pourrait être fixé à 13 au lieu de 15 pour davantage de progressivité en fonction des states. La mission propose également de permettre le dépôt de listes incomplètes, pour lesquelles le nombre minimum de candidats par liste serait fixé à 11, de même que l’effectif à partir duquel le conseil municipal serait réputé complet.
Deux recommandations distinctes s’agissant du seuil à retenir, à partir duquel le scrutin de liste s’appliquerait – divergence entre les rapporteurs
- Le Député SCHELLENBERGER prônait l’abaissement du seuil aux communes de 500 habitants (et donc le maintien du scrutin plurinominal avec possibilité de panachage dans les communes de moins de 500 habitants) ;
- la Députée JACQUIER-LAFORGE demandait la suppression de tout seuil partant du fait que sans contrainte légale cela ne fonctionnerait pas. Selon la Députée, l’extension du scrutin de liste n’aura pas pour effet de rendre plus difficile la constitution des listes, en particulier si elle est accompagnée d’efforts transversaux en faveur de l’égalité hommes-femmes (réflexion sur le statut de l’élu, multiplication des modules d’éducation à la citoyenneté incluant la promotion de l’égalité entre les sexes, instauration de conseils municipaux d’enfants paritaires, etc.). La multiplication éventuelle de listes uniques de doit pas nécessairement être perçue comme une atteinte au pluralisme mais comme l’avènement, sur le terrain, d’un projet local consensuel. Enfin, le risque d’atteinte au pluralisme serait limité grâce aux aménagements au principe de complétude. Pour les communes de moins de 100 habitants, le nombre minimum de candidats par liste s’établirait à 5, par cohérence avec l’effectif à partir duquel le conseil municipal est réputé complet. Ce chiffre serait fixé à 9 pour les communes de 100 à 499 habitants ;
- les associations d’élus y sont favorables, à commencer par l’AMF qui s’était prononcée pour cette solution en 2018 : en juillet 2018, le bureau de l’AMF a validé les propositions du groupe de travail consacré à la promotion des femmes dans les exécutifs locaux. L’extension du scrutin de la liste paritaire à toutes les communes figurait dans ces propositions. Cécile GALLIEN rappelait à cette occasion que les petites communes rurales étaient meilleures élèves que les grandes sur la féminisation de la fonction du maire, avec un taux de femmes maires à 18%, supérieur à la moyenne nationale.
À NOTER
À l’occasion de ce rapport, les rapporteurs ont également invité le ministère de l’Intérieur à « se saisir » d’une question qui « suscite l’incompréhension des élus » : le Code électoral prévoit le remplacement en cas de besoin d’un conseiller communautaire « par un suivant de liste du même sexe ». Mais « en l’absence de conseillers municipaux remplissant les conditions nécessaires, le siège reste vacant jusqu’au prochain renouvellement du conseil municipal ». Cette disposition « est susceptible de nuire à la représentation de la commune concernée par la vacance au sein du conseil communautaire », notent les rapporteurs.
Proposition de loi résultant de la mission flash
Visant à renforcer la parité dans les fonctions électives et exécutives du bloc communal, cette proposition de loi de Mme JACQUIER-LAFORGE constitue la traduction législative des recommandations portées par la députée dans le cadre de la mission « flash ».
S’agissant des communes de moins de 1 000 habitants, la proposition de loi étend le scrutin de liste paritaire en vigueur dans les communes de plus grande taille. Afin de ne pas porter une atteinte excessive au principe constitutionnel de pluralisme, elle autorise également le dépôt de listes incomplètes (article 1er) et élargit les dérogations au principe de complétude du conseil municipal, prévues actuellement pour les communes de moins de 500 habitants, aux communes entre 500 et 999 habitants (article 3).
Ces dispositions s’inscrivent dans les demandes de plusieurs associations d’élus, formulées depuis 2018, avec le Haut conseil à l’égalité.
En complément, la proposition de loi diminue le nombre de membres du conseil municipal pour les communes comptant entre 500 et 999 habitants, de 15 à 13 membres (article 2). Une telle disposition aura de surcroit pout effet de rendre plus progressive l’évolution de l’effectif du conseil municipal par strate de commune.
Table ronde de la DDF du Sénat le 4 mars 2021 dédiée aux difficultés d’accès aux responsabilités des femmes dans les territoires ruraux
Depuis la loi de 2014 imposant la parité sur les listes des communes de plus de 1 000 habitants, la parité a progressé dans les exécutifs locaux. La proportion de femmes dans les conseils municipaux en tant que maires, adjointes, ou autres conseillères a augmenté de + 2,5% au lendemain des élections municipales de 2020, atteignant 42,4% alors qu’elle n’était que de 39 ,9% à la fin du mandat précédent, chiffrait le bulletin d’information statistique (BIS) de la DCGL, n°145, publié en septembre 2020. Reste que les femmes occupent toujours plus souvent des fonctions exécutives autres que celle de maire : elles représentent 33,3% des premiers adjoints, 42,2% des seconds adjoints.
De cette table ronde, il ressort qu’une mesure semble faire consensus auprès des différentes associations d’élus : l’obligation de parité à toutes les communes, y compris celles de moins de 1 000 habitants. Une proposition à laquelle l’AMRF s’est ralliée, alors que, comme le rappelle la Sénatrice BILLON, « en 2019, l’AMRF s’était montrée très très opposée à cette avancée ». Nadine KERSAUDY, Secrétaire générale adjointe de l’AMRF, affirme ainsi être « favorable à ce que le scrutin de liste démarre au premier habitant ». Même son de cloche du côté de l’AMF : Cécile GALLIEN et Edith GUEUGNEAU, qui coprésident le groupe de travail Egalité femmes-hommes créé il y a plus de quatre ans au sein de l’AMF, se disent favorables « à ce que les communes de moins de 1 000 habitants aient un scrutin de liste ».
Les propositions de l’AMF
Le groupe de travail de l’AMF sur la promotion des femmes dans les exécutifs locaux a présenté le 7 avril 2021 une synthèse de ses propositions devant le Bureau de l’AMF qui les a validées. Ces propositions reprennent en grande partie celles formulées dès 2018 par l’AMF. Principal objectif : renforcer la parité dans les petites communes, qui ne sont pas les plus mauvais élèves au demeurant en la matière. Pour ce faire, le groupe de travail propose de généraliser le scrutin de liste paritaire dans les communes de moins de 1 000 habitants « et donc [la] suppression corrélative du panachage et du décomptage uninominal des voix ». Il recommande « la généralisation de l’exécutif paritaire et alterné pour les adjoints au maire des communes de moins de 1 000 habitants ». Et suggère (pour toutes les communes) « la prise en compte du maire dans le calcul de la parité pour les adjoints au maire quand le nombre d’adjoint est impair (…). S’il y a 5 adjoints et que le maire est une femme, 3 postes d’adjoints sont alors proposés aux hommes (et réciproquement) ». « Certains parlementaires estiment que la suppression du seuil de 1 000 habitants s’agissant des règles de parité pourrait constituer une entrave au principe du pluralisme en rendant complexe l’élaboration d’une liste exhaustive », note le groupe de travail de l’AMF. Le Conseil constitutionnel a de fait rappeler la nécessité de concilier la parité et le principe de pluralisme des courants d’idées et d’opinions. Le groupe de travail rejette toutefois catégoriquement un scrutin qui serait spécifique aux communes de moins de 1 000 habitants comme l’élection par binôme mixte.